Opposition beloeilloise à la vente de Rona à Lowe’s

Par Isabelle Laramée
Le marchand-propriétaire de la succursale Rona de Beloeil, Stéphane Gagnon, est contre la vente de Rona à Lowe's. Il est d'ailleurs l’initiateur d’une lettre envoyée au président et chef de la direction de l'entreprise américaine, dans laquelle il s'oppose au possible achat de la bannière québécoise par ce géant de la quincaillerie.
Signée par 164 marchands Rona, cette missive a fait boule de neige, la semaine dernière, et a révélé les craintes de ceux-ci.
« La philosophie d’entreprise de Lowe’s est basée sur les grandes surfaces ou très grandes surfaces. De plus, les magasins sont tous corporatifs. Les décisions sont prises en Caroline du Nord et leurs marchandises proviennent des États-Unis », explique Stéphane Gagnon, président du Groupe Gagnon, qui possède six magasins Rona dans la grande région de Montréal, dont ceux de Beloeil, de Saint-Hyacinthe et de Saint-Bruno.
Pour lui, la vente de ce fleuron québécois à des Américains irait à l’encontre des valeurs fondamentales de Rona. M. Gagnon explique que le modèle développé au Québec est axé sur des magasins de proximité possédant une surface plus petite.
Il rappelle de plus que 80 % des fournisseurs sont canadiens. « C’est là qu'est le réel enrichissement collectif. C’est une partie du moteur de l’économie québécoise. »
La vente occasionnerait plusieurs pertes d’emplois, tant chez les fournisseurs québécois et canadiens qu'au siège social situé à Boucherville, estime-t-il.
Vision à long terme
Pour ce marchand Rona de troisième génération, les pertes financières subies par l’entreprise en 2011 ne sont pas inquiétantes.
« Notre plan d’affaires fonctionne, mais il est basé sur une vision à long terme. C’est là le problème, car les financiers ont de la difficulté à comparer », dit M. Gagnon, soulignant que c’est la première fois que l’entreprise enregistre des pertes annuelles.
Aux dires de l’entrepreneur, la majorité des investissements des propriétaires-marchands sont faits dans leur commerce. C’est pourquoi ceux-ci sont difficilement quantifiables.
« Nos commerces sont adaptés à nos régions et à notre clientèle. Il ne faut pas quantifier cela par un profit à court terme basé sur des actions. Nous avons plus d’argent dans nos commerces que dans nos actions. »
Les franchisés Rona sont inquiets puisque Lowe's n’a aucune expérience en gestion de franchise et de petite surface. L’incertitude quant à cette gestion est l'enjeu majeur pour ces derniers.
« Rona est notre plan de développement et nous soutient depuis le début, mentionne M. Gagnon. Quand la maison mère est proche, ce sont les marchands qui influencent les décisions. Il est donc possible de s’ajuster et de modifier certaines choses, comme ce fut le cas avec le magasin de Beloeil. »
En attendant la contre-offre de Lowe’s, quelques marchands ont décidé d’augmenter leur part d’actions afin d’accroître leur pouvoir décisionnel.
« Si tous les petits pourcentages d’actions amassés deviennent importants, nous pourrons peut-être bloquer la deuxième contre-offre », espère Stéphane Gagnon.
La direction de Rona n’a pas voulu commenter la situation, précisant que l’envoi de la lettre est une initiative indépendante des marchands-signataires. La compagnie tient à souligner avoir été informée de cette initiative seulement une fois la lettre envoyée.
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