N.-É.: des pêcheurs s'inquiètent concernant une possible exploitation pétrolière
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Par La Presse Canadienne, 2024
HALIFAX — Les représentants du secteur des produits de la mer de la Nouvelle-Écosse ont exprimé jeudi leur inquiétude concernant les commentaires du premier ministre de la province, selon lesquels il est ouvert à la fin du moratoire sur le forage de combustibles fossiles dans les riches zones de pêche du banc Georges.
Le premier ministre Tim Houston avait dit la veille que la province devait reconsidérer les interdictions sur diverses industries, notamment l'extraction d'uranium et la fracturation hydraulique, afin de diversifier l'économie face aux menaces de tarifs du président américain Donald Trump.
Les journalistes ont demandé au premier ministre si cela incluait de faire pression pour lever le moratoire sur le forage dans les zones du banc Georges au large du sud de la Nouvelle-Écosse, qui est actuellement en vigueur jusqu'à la fin de 2032.
M. Houston a répondu que même s'il se rend compte que les citoyens ont le droit de soulever des questions sur les risques, des propositions de réouverture de la zone à l'exploration des combustibles fossiles ne peuvent être exclues.
«Je pense que les gens ont le droit de s'inquiéter du fait que cela se fasse en toute sécurité, et ce sont donc des questions auxquelles il faut répondre, mais ce sont des discussions à avoir», a-t-il affirmé.
«Je veux dire qu'en ce moment, dans cette province, on ne peut même pas parler de quelque chose... quelqu'un a mentionné le banc Georges, et nous sommes nerveux à l'idée d'avoir une discussion.»
«La pêche, l'agriculture, la foresterie, notre province a été bâtie sur ces industries traditionnelles... mais nous devons aussi avoir des discussions sur ce que nous pouvons faire en toute sécurité en dehors de cela», a ajouté M. Houston.
Richard d'Entremont, président d'Acadian Fish Processors à Lower West Pubnico, en Nouvelle-Écosse, a soutenu dans une entrevue jeudi que l'annulation de l'interdiction de forage réduirait les zones de pêche et serait un désastre potentiel pour les pêcheurs en raison du risque de déversement.
«C'est la dernière chose que je veux voir parce que tous nos quotas sont là. Nous pêchons là-bas toute l'année et j'ai peur que s'ils établissent une zone exclusive autour de ces plates-formes pétrolières, nous perdions beaucoup de territoire où nous ne pourrions plus pêcher», a-t-il expliqué.
«Le banc Georges a sauvé notre zone de pêche pendant des années ici», a dit M. d'Entremont, 75 ans, dont l'entreprise pêche l'aiglefin et le colin dans la région.
Kris Vascotto, directeur exécutif de la Nova Scotia Seafood Alliance, affirme que la possibilité de perdre toute récolte du banc Georges est «très préoccupante», et son groupe aimerait obtenir des déclarations claires de la part de la province sur «quels sont exactement ses plans».
Le porte-parole de l'industrie a déclaré que le banc Georges apporte déjà «une contribution incroyable à l'économie de la Nouvelle-Écosse, et nous détesterions voir cela mis en péril à cause d'un développement des ressources entrepris de manière ad hoc».
Le moratoire sur l'exploration pétrolière et gazière dans le banc Georges a été prolongé en avril 2022 jusqu'à la fin de 2032. La loi fédérale et provinciale permet de prolonger le moratoire sur les riches zones de pêche par tranches allant jusqu'à 10 ans.
Lorsque le ministre fédéral des Ressources naturelles, Jonathan Wilkinson, a annoncé la prolongation, il a soutenu qu'elle aiderait à maintenir un «écosystème unique et précieux pour les générations actuelles et futures».
Le banc est situé au bord du plateau continental atlantique, entre Cape Cod et la Nouvelle-Écosse, et est partagé avec les États-Unis, avec une frontière convenue au niveau international.
Le cabinet de M. Houston avait convoqué mercredi la conférence de presse pour discuter de l'effet potentiel de nouveaux tarifs sur les exportations canadiennes, mais le premier ministre a consacré une grande partie de son temps à discuter d'une lettre qu'il avait écrite aux membres de son caucus, affirmant que la province devait devenir plus autonome économiquement.
La lettre décrit la nécessité pour la province de saisir des opportunités inexploitées sur lesquelles les gouvernements précédents «n'ont pas eu le courage d'agir».
«Nous devons éliminer le "non" de la Nouvelle-Écosse. Les intérêts particuliers ont accaparé trop de secteurs de notre économie et ont eu une voix démesurée dans l'élaboration des politiques. Cela doit cesser. Les interdictions pures et simples de secteurs entiers sont une politique publique paresseuse et nous allons annuler les interdictions et nous concentrer sur une discussion significative et mature», indique la lettre.
Michael Tutton, La Presse Canadienne